Cette fois, ils étaient on ne peut plus nombreux. Il fallait s’y attendre… Depuis que le quatorzième a commencé à se manifester à travers moi, ils ne cessent de venir me trouver en ne me laissant que très peu de temps de pause. C’est assez problématique puisque je ne peux pas m’éloigner des villes qui sont mon lieu principal de travail. Comment gagner de l’argent si ce n’est en utilisant mes talents d’acrobate ? Ah… Mana… Je ne pensais pas que nos tours me seraient aussi utiles maintenant que tu n’es plus à mes côtés. Pourtant, me voilà, exorciste déchu devant gagner sa vie comme lorsqu’il était enfant. Quelle ironie ! D’autant plus que je n’ai rien fait de mal, si ce n’est que je me fais lentement posséder par un être sur lequel je ne sais rien.

Je suis à court de médicaments et en plein cœur de Paris. Je ne sais pas si je dois me sentir chanceux ou non. Mais, au point où j’en suis, je doute que me plaindre de la situation m’avancera à quoi que ce soit. Alors, bien que je sois fatigué et couvert de sang, je marche lentement dans les rues qui s’étendent devant moi pour essayer de trouver un apothicaire ou au moins un endroit où me reposer pour la nuit. Heureusement, j’ai pu ranger mes affaires avant l’attaque des Akumas. Ce que je crains maintenant, c’est l’efficacité de la branche française de la Congrégation de l’Ombre. Avec l’activité qu’il vient d’avoir, je doute qu’ils restent tranquillement dans leur quartier général bien longtemps. Je dois être parti quand ils arriveront, sans quoi je ne donne pas chère de ma peau. … Ou la leur. Qui sait combien de temps je pourrai le retenir, surtout dans cet état.

Anxieux, le moindre bruit me ferait fuir. Et cela se vérifie assez rapidement quand j’entends justement comme des bruits de pas derrière moi. Rapidement, je m’engouffre dans une ruelle proche de ma position. Elle indique une impasse, mais avec Crown Clown, je devrais justement pouvoir m’en sortir. Mais il semblerait que je n’aurais pas besoin de l’utiliser. Qui eut cru qu’il y aurait l’objet de mes recherches dans les parages. Un apothicaire…
Sans plus réfléchir, j’entre dans le bâtiment, toujours couvert de sang et totalement fatigué. Il s’agit d’un lieu clair, apparemment très bien organisé et, surtout, très calme. Je n’ai plus qu’à espérer que la discrétion est au rendez-vous, que je n’aurais pas à faire face à des personnes qui sont à ma recherche et que je n’apporterais aucun problème au propriétaire des lieux. En attendant, un peu inquiet que ce soit fermé parce que le soir, tombe, j’appelle doucement :



Ce serait bien ma veine que personne ne soit pas là. Attends. Je n’ai quand même pas cassé la porte sans m’en rendre compte quand même ?! Automatiquement, je regarde derrière moi en espérant ne pas voir un nouveau désastre provoqué par mes soins. Mais non, il semblerait que tout soit en ordre. Dans ce cas, ça devrait aller. La personne s’occupant des lieux devrait bientôt arriver. Je ne vois aucun endroit pour s’asseoir… Mince, j’ai les jambes qui flageolent un peu. Allez Allen ! Un peu de nerfs ! Tu as connu de pires moments que celui-là. Ce n’est rien du tout, juste une petite coupure de rien du tout. De l’alcool et du repos puis c’est reparti.

Finalement, peut-être n’y a-t-il personne ? Cela serait étrange puisque la porte est encore ouverte. Mais puisque personne n’arrive et qu’il se fait tard, je me demande si ce n’est pas moi qui ai forcé la porte sans le vouloir. Allez savoir, avec la panique je pourrais en être capable, bien que je ne sois pas ravi à l’idée d’ajouter des dettes à celles de mon maître que je désespère de pouvoir payer un jour. Mon maître… Est-ce vraiment tout ce qu’il a pu me léguer ? Une montagne de dettes que je connais sur le bout des doigts et des souvenirs ? Ahah ! Qui aurait pu croire que ma vie puisse être ainsi un jour ? Il ne me semble pas avoir œuvré d’une manière ou d’une autre pour me retrouver dans une telle situation. Pourtant, je vais devoir faire avec. Et, dans le cas présent, je vais devoir me dépêcher pour ne mettre personne en danger. Et toi, Quatorzième, est-ce vraiment ce que tu voulais ? Qu’est-ce que ça fait d’être en moi ? Comment en es-tu venu à investir mon corps ? Ne peux-tu pas me le dire une bonne fois pour toute ? Suis-je condamné à l’ignorance ? Quelle plaie !

La fatigue se fait sentir. J’ai dû crapahuter toute la journée sans m’arrêter et je perds encore du sang. Je suis vraiment désolé pour le sol de cette échoppe, mais il semble qu’il va y avoir quelques traces… Et je ne peux pas dédommager le propriétaire des lieux. Ah ! Non. La propriétaire peut-être. C’est une femme qui vient m’accueillir depuis l’arrière boutique. Quelle chance ! J’espère juste qu’elle ne me chassera pas tout de suite ou que je ne lui ferais pas peur. Je dois vraiment avoir une sale gueule puisqu’elle me regarde sans rien dire. Elle ne crie pas et n’appelle pas à l’aide, c’est déjà pas mal. Je me dis que nous allons potentiellement pouvoir faire affaire quand elle aura compris la situation. J’aimerais qu’elle le fasse rapidement, mais il serait pire que mieux de la brusquer, je pense. Autant perdre quelques précieuses minutes plutôt qu’une bonne heure. D’autant plus que je ne suis pas en état de m’occuper de quelqu’un, en l’état actuel des choses.

Le temps que j’attends n’est pas si long avant que vous ne vous repreniez. C’est assez rassurant, je dois l’avouer. Je vous souris donc poliment, bien que mes mimiques puissent être passablement crispées, et répond rapidement à vos interrogations dignes d’une professionnelle :



J’imagine qu’il ne doit pas être nécessaire de préciser que j’ai fait une mauvaise rencontre. Si vous vous inquiétez de mon état, c’est que je dois vraiment faire peur à voir. Je ne pensais pas que ce serait à ce point, pourtant je ne suis pas du tout étonné. Et, pour tenter de limiter l’attention qu’on pourrait me porter, je demande l’air de rien en attendant ma commande :



J’ai cru voir quelques enseignes par ici, mais je n’y ai pas vraiment fait attention. Il est difficile de faire attention à tout en étant en fuite. Encore plus lorsqu’on combat des Akumas. D’ailleurs, les concernant, je me demande pourquoi ils s’en prennent à moi dès lors qu’ils ressentent le Quatorzième. Est-il réellement un traître ? Ou est-ce ma faute ? Impossible d’enquêter en l’état…