POURQUOI MOI ?

La douce lueur crépusculaire nimbait l'île et mon château d'une lueur doré teintée de couleurs chaudes et accentuait les ombres qui se formaient. Elle se reflétait dans les vitres et l'eau du lac, les faisant chatoyer de milles feux. Ce spectacle visible depuis mon observatoire était toujours aussi plaisant à admirer, et ce, même après quelques centaines d'années. Je ne quittais des yeux mon domaine seulement lorsque la nuit eu prit pleine possession du ciel et de la terre.
J'avais travaillé longtemps et après un tel spectacle, une tasse de thé serait un bon moyen de conclure cette journée productive. D'un pas leste je descendais dans le salon de la cache dans lequel un feu crépitait dans son foyer et un service à thé m'attendait. Mais au lieu de m'y diriger je m'arrêtais à peine la dernière marche passée pour fixer un regard à la fois étonné et suspicieux sur ce qui semblait être un sac vivant, posé en plein milieu du dit salon. Hmmmm... Est-ce encore un piège de Kale ? Ce ne pouvait pas être Gabriel et Anne ne quittait pas souvent l'Australie. Ca ne pouvait être que ce gamin... En parlant de gamin, il y en avait un autre qui pouvait faire ce genre de trucs ... En regardant bien je pouvais voir un morceau de papier fixé au sac en jute qui bougeait toujours. Celui qui avait laissé ça ici écrivait soit très mal, soit trop petit pour que je puisse lire d'où j'étais. Pour savoir il fallait donc s'approcher. N'ayant aucune confiance, j'invoquais une simple ombre et lui demandait de me rapporter la note. Il me la rapporta sans qu'un piège quelconque se déclenche. Je lisais la note, bien courte en réalité et tout en jurant la froissais et la jetais dans le feu. Il avait pas fait ça ce gros débile quand même ! Vivement je me dirigeais vers le sac et l'ouvris. Je découvris un gamin ligoté, jurant tout son soul et se débattant.
La paume de ma main rejoignit mon front en un claquement sec et je soupirais. Si il l'avait fait. Non mais j'hallucinais. Je fermais les yeux et me pinçais l'arrête de nez essayant de calmer la migraine qui commençait à pointer son museau. Les bruits fait par mon invité surprise me firent rouvrir les yeux. Je le fixais, blasée, et lui fit un signe l'incitant à ce calmer.

- Doucement, doucement. Je vais te détacher. Ne bouge pas, je ne voudrais pas te blesser par inadvertance ...

Sur ces mots, j'ouvris un tiroir et en sortais un couteau bien aiguisé. Les liens tranchés, je rangeais la lame et allait me verser un verre de thé. Quoi que ... à bien y réfléchir, je sortis la bouteille de vodka du guéridon et m'en servis un bon verre. Je me tournais alors vers mon invité.

- Bien. Je suis Hécate Katelya Romanov. Je pense que j'aurais été ravie de te rencontrer dans d'autres circonstances, actuellement je suis plutôt sur le point de souffrir d'une migraine... Veut tu boire quelque chose pendant que j'essaie de savoir pourquoi tu a atterrit dans mon salon ?

POURQUOI MOI ?

Le verre lui avait fait du bien, l'alcool était bon mais c'était à peu près tous les points positifs dans cette situation. L'homme que je venais de libérer, assit en tailleur au milieu de mon salon, me fixais.

– Non merci. Si vous recevez l’illumination, je vous serez reconnaissant de me l’expliquer.

Contrairement à ce qu'il disait sa voix était agréable à entendre. Alors lui non plus ne savait pas. Très bien, dans quelle merde m'avait foutue ce type ? Je le regardais examiner la pancarte pendue autour de son cou et soupirais. Plus de doutes, avec un sens de l'humour aussi douteux, ça ne pouvais être que lui. En ressentant le besoin, je me resservis un verre.

- Ce n’était pas là ça…

Je me retournais pour voir ce dont il parlait quand je vis le tatouage. PUTAIN ! Le verre se brisa entre mes doigts sous la vague d'énergie magie que ma surprise et de la légère colère qui venait de pointer son nez libérèrent. Cela faisait longtemps que je n'avais pas sentit ce sentiment fort qu'était la colère tient. Je secouais la main, faisant fi des brisures de verres et de l'alcool qui coulait de mes doigts tout en m'approchant de l'inconnu. Je lui pris la main, passait le doigt sur le tatouage. Effectivement, il était vrai. Maintenant que je faisais attention, je pouvais sentir qu'il faisait partit du groupe. Cette fois ci ce ne fut pas la fatigue qui me fis soupirer mais l'exaspération.

- Par la Lune, mais qu'est ce que cet idiot à fait ? ...

Je me relevais et regardais longuement le nouveau membre du groupe de sorciers ultra-secret ... qui n'était pas un sorcier. Me prenant l'arrête du nez entre l'index et le pouce, je soupirais de nouveau alors que j'invoquais une ombre avec quelques simples mots, "viens à moi". Des volutes sombres s'élevèrent du sol pour former un soldat en armure, dont seul l'espace pour les yeux du casque était illuminé par une faible lueur bleue. Pour moi c'était quelque chose de normal, faisant partit de moi, mais je me demandais toujours comme les autres voyaient ce tour ... Bref ce n'était pas le moment.

- Va chercher Vassily.

L'ombre disparue, se transformant de nouveau en volutes et se glissant hors de la cache pour aller chercher mon majordome. En attendant mon homme, je m'asseyais dans le grand fauteuil près du feu et désignais le canapé à mon invité.

- Je ne sais pas ce qu'il s'est passé, et pour être franche, ni vous ni moi ne le saurons peut-être jamais. Celui qui vous a amené à moi est un g.... J'allais dire gamin, mais je ne laisserais pas mon opinion dicter une mauvaise vision de notre chef au nouveau. Quoi que, il se l'était surement déjà faite. ..agit selon ses désirs. Cependant, je peux t'expliquer tout ce qui est en rapport avec ce tatouage. Tout ce qu'il implique et ce qu'il signifie.

Je repensais à la note. Je comprenais mieux maintenant... Vassily entra dans la pièce et s'inclina légèrement devant moi, avant d'apercevoir notre invité pour une durée indéterminée qu'il salua également.

- Vassily voici ... Au fait, comment t'appelle tu ? ... Il va rester avec nous quelques temps. Préparez lui une chambre, des habits, traitez le comme quelqu'un de la famille, car à partir de maintenant c'est un membre de l'Augure.

Mon majordome n'émit aucuns commentaires, il s'inclina et repartit. Quelques secondes plus tard, surement après avec donné les ordres qui s'imposait, il revint avec un carré de tissu et un contenant en bois. En silence il commença à ramasser les morceaux de verres et à éponger le sol. Pendant ce temps je réfléchissais au meilleurs moyen de tout dire à mon pupille. Car oui, apparemment, à partir d’aujourd’hui, j'étais sa tutrice.

POURQUOI MOI ?

Alors que je réfléchissais à quoi dire, quoi faire, mon pupille qui s'était levé et me fixais bizarrement, prit la parole.

– Un instant… De quoi parlez-vous ? Je ne compte pas faire parti de quoi que ce soit, j’ai déjà des obligations. Maintenant, je vous serais reconnaissant si vous pouviez m’indiquer la sortie. Je vais avoir assez d’ennuis à expliquer ma disparition.

Et rien qu'avec cette phrase je sus que la soirée allait pas être toute rose. Enfin encore moins qu'avant. Je me pinçais l'arrête du nez et soupirais. Encore. Puis fis un signe rapide de la main.

- Euh hé bien comment dire... Je ne pense pas que ce soit judicieux. Je lui jetais un coup d'oeil et me mordillais la lèvre inférieure. Ecoute, toute cette situation est plus que bizarre et crois moi, j'en ai vue, des situations inédites, je comprends donc que tu ne me fasse pas confiance. Cependant, j'aimerais que tu prennes le temps de m'écouter et de comprendre la situation dans laquelle tu ... nous sommes. Je désignais sa main sur laquelle était bien visible le tatouage. Parce que ça, c'est quelque chose de très important. Quelque chose qui a déjà révolutionné ta vie, bon gré mal gré. Je ne sais pas pourquoi celui qui t'a amené ici à fait cela, ni pourquoi il te l'a offert, mais c'est ... J'hésitais une demis seconde.. un symbole puissant. Je prenais le verre de liquide transparent que me tendait Vassily, le remerciais et en prenais une gorgée. Avant de sortir, de traverser la Russie et le monde pour repartir où tu était avant d’atterrir ici, ne veut tu pas savoir qui a fait ça et dans quoi il t'a embarqué ?

J'espère qu'il allait rester et demander plus d'informations, parce que si il persistait à vouloir partir, la seule solution serait la séquestration. Et même si cette solution n'était pas pour me déplaire dans certains cas, ici, ça me compliquerais la vie plus qu'autre chose.

POURQUOI MOI ?

Tout en parlant j’espérais vraiment que mon petit discours le convaincrait. Son expression de surprise pure quand je mentionnais la Russie. Tient, ça s'était intéressant.

– Attendez une seconde… comment ça en Russie ? On est quel jour exactement ?

- Oui en Russie... Vous êtes dans mon château dans la foret non loin de St-Peterbourg. Quant au jours, nous somme le trois juin, enfin bientôt le quatre...

Je le regardait réfléchir à tout cela et devenir très sérieux. J'avais surement une chance de ne pas le séquestrer et de le garder ici de son bon gré.

– Je déteste ce genre de situation et cela ne semble pas aller en s’arrangeant… mais puisque vous êtes la seule à pouvoir répondre à mes questions et m’expliquer ce qui s’est passé, je vous écoute.

Je relâchais le souffle que je ne pensais pas retenir. Il fallait que je parle au grand chef pour lui signaler que je n'aimais pas ce genre de surprise. C'était beaucoup trop stressant pour moi, je préférais largement détruire des villes que être dans ce genre de situations bizarres. Je fis signe à Askel de s'asseoir sur le canapé et une fois qu'il le fit, croisais les doigts.

- Bon. Je ne sais pas trop comment t'expliquer tout cela logiquement... En fait, je pense qu'il faut partir du principe que la Magie n'est pas logique. Après avoir compris ça c'est plus logique. Je pris une grande inspiration avant de commencer mon explication, ou plutôt mon monologue. Tient ça me rappelais une situation similaire... Bon alors, je pense que je vais commencer par moi : d'abord voici mon nom complet : Hécate Maria Katelya Alexandrina Moskovski Romanov. Je suis une sorcière née environs vers 1250, à ce moment là on avait pas les registres de maintenant, donc c'était plutôt dur de connaitre son âge exact. J'ai été Reine de toutes les Russies vers 1265 et c'est à ce moment là que j'ai été contactée par un homme qui m'offrais de rejoindre un groupe de sorciers un peu particulier. J'ai accepté. Me voila donc six cent ans et quelques plus tard. Je fis une petite pause. C'est fou comme le temps passe vite quand on y fait pas attention ... Enfin bon, là n'est pas le sujet. Je balayais l'air de ma main. Ce groupe de sorcier sort, comme je l'ai dit, de l'ordinaire. Déjà parce que seuls des sorciers puissants ou ayant une habilité particulière sont acceptés et ensuite parce que nous obéissons tous à un seul homme, se faisant appeler l'Empereur. Un homme bien plus vieux que moi, honnêtement on ne sait même pas si il est humain ... Je laissais un faible blanc. Celui qui t'a déposé ici et donné cette marque. Je désignais une nouvelle fois sa marque. Cette marque est l'emblème de notre cercle,l'Augure, et c'est également un sceau. J'ai le mienne tatoué ici, je désignais l'endroit juste sous ma poitrine, bien au milieu. Ce sceau signifie que tu fait partie du groupe, elle te donne beaucoup d'avantages comme te permettre d'entrer et de sortir de tous les endroits qui appartiennent à l'Augure et qui sont grandement protégés, protégés par des dizaines de couches de sorts, pour les premiers, plus vieux que moi. Devais je lui dire toutes les obligations du membre ? Bah pour l'instant j'allais laisser ça de coté. Ce sceau implique quelques devoirs également de la part du membre ... Mais le plus important est que, en plus de t'offrir cet marque tu a aussi l'immortalité en cadeau. Je suis désolée mais je pense que tu n'y a pas fait exception. Et surtout, une fois entré dans l'Augure, c'est comme la Bratva, on ne peut plus en sortir.

Contrairement au speech que j'avais servis à Gabriel lors de notre première rencontre -voila pourquoi ça me disais un truc !- je n'allais pas tout lui balancer directement, je ne savais pas comment il allait réagir et surtout, en fonction de ses réactions je pourrais décider de ce que je laisserais en dehors de la conversation ou pas. Le plus important est qu'il comprenne que son appartenance à l'Augure était définitif. Je ne savais pas pourquoi l'Empereur avait amené un simple humain dans le groupe, surement une raison débile même si on espère tous que non, mais c'était fait et si mes recherches avaient apportées quelque chose c'était que cette marque n'était pas effaçable. Une fois qu'on l'avait c'était à la vie à la mort. Et les gens avaient l'intelligence de choisir la vie en général.

POURQUOI MOI ?

Il m'avait écouté sans même bronché. Pas une once de surprises suite à mon nom ou mon âge. Rien. Il était étonnamment placide le gamin. Askel laissa un blanc passer et je pouvais voir les rouages tourner dans son cerveau.

– Si je mets de côté le « cadeau », il y a plusieurs choses qui m’interpellent. Vous parlez d’un groupe de sorciers, mais au cas où il y aurait méprise à ce sujet, je n’en suis pas un. Quant à vos devoirs… si j’en juge le lieu actuel, est-ce que cela à un quelconque rapport avec un savoir particulier ? Il fit une brève pause. Même si en sortir semble moins dangereux que concernant votre « Augure », comme je l’ai dit, j’ai déjà une obligation bien particulière. Alors à moins que votre Empereur n’ai une raison valable de m’embarquer dans ces idioties, je ne compte pas – et ce d’aucune façon – de cesser mon devoir de Bookman.

Je grimaçais légèrement. Ca allait pas être de tout repos. Je reposais le verre d'alcool désormais vide sur la table basse. On pouvait essayer de démêler tout cela ensemble. Il devait y avoir quelque chose qui avait poussé l'Empereur à faire cela.

- Je sais que tu n'est pas un sorcier. C'est pour cela que je suis tout autant surprise que toi de savoir que l'Empereur t'a intégré au groupe. Et si j'en juge par ton attitude, il ne t'as même pas fait de proposition, il l'a fait sans même que tu le sache. Il n'a jamais fait ça. Je fis une pause, autant pour remettre en ordre mon esprit que mes connaissances. Ca lui ressemble pas. Il laisse toujours le choix. Ces deux phrases étaient murmurées. Plus pour moi que pour mon invité. Je repris ma tonalité normale. N'as tu aucunes idées des causes ? Tu dit être un Bookman. Je suppose que tu as un maître, sait tu si il s'est passé quelque chose entre lui et l'Empereur ? Ou as tu offensé quelqu'un que tu ne connaissait pas ?

Il était fort possible que lui ou son maître ai fait chier l'Empereur et que se dernier se venge. Cela expliquerai l'absence de choix et la livraison express dans mon salon.

- Sache que t'as première observation fut la bonne. Les devoirs dont je parles ont un lien avec le savoir. Considère qu'on fait la même chose que vous Bookmans, sauf qu'a la place de l'apprendre par coeur, on le met par écrit. De plus on récolte et protège tout artefact magique. Livres de sorts, objets maudits, tout.

Je me passais la main sur la nuque, sentant une douleur commencer à poindre. Cette situation n'e me mettait pas à mon aise du tout. Je me levais et commençais à faire les cent pas. Quelque chose clochait. Autant avec la situation d'Askel qu'avec ... avec quoi d'ailleurs ? Mon instinct me disait qu'il y avait un truc qui allait pas. Je tentais alors quelque chose. J’essayais de visualiser l'Empereur et lui envoyais un message télépathique : "Empereur, auriez vous du temps à m'accorder ? Pour discuter de votre "cadeau" dans mon salon ?" J'espérais qu'il me répondrait franchement au lieu de me laisser en plan. Je n'aimais pas ça du tout.

Mise sur répondeur semi-automatique...

« Je m’excuse, mon temps est limité mais je sais que tu arrivera à gérer la situation. Je vais être indisponible pendant un moment alors n’essaie pas de me contacter. Inutile de… Reste chez toi pour le moment, le temps que je calme la situation. »